11 juin 1934 : Plusieurs légionnaires (nombre indéterminé) tués dans une attaque menée contre un camion de l’armée française sur la piste de Tizgui.
26 juin 1934 : Le lieutenant Roger Phellipon tué à Assoul.
En 1934 aussi (jour non indiqué), Zaïd et «sa bande» attaquent une corvée à Talanaït Moulay Ali, sans faire de victimes.
Juillet 1934 : Attaque du campement d’un détachement envoyé en reconnaissance au col de Timesraï, à 10 km au nord de Tinerhir, tuant un mokhazni.
Décembre 1934 : Attaque « en plein après-midi » de la garnison du poste de Ouaoukouden. Un militaire tué et deux autres blessés.
27 janvier 1935 : Assassinat du sergent chef Cristani à la sortie des gorges de Tinerhir.
1er juin 1935. : Assassinat dans une embuscade du lieutenant Fromentin sur le plateau des lacs.
17 août 1935 : Zaïd et deux de ses complices attaquent et séquestrent trois civils à Timadrouine. Ils les dépouillent de leurs biens avant de les libérer.
22 août 1935 : Assassinat du cheikh M’Bark Ou Bouâza, des Aït Ouritane, et un de ses amis, à l’entrée des gorges de n'Tizgui.
Fin décembre 1935 : Attaque d'une cantine à Tinerhir, tuant trois légionnaires et blessant trois mokhaznis et un client israélite.
Zaïd ou Ahmed est tué le 5 mars 1936 à Tadafalt.
Trois articles furent publiés en mars 1936 après la mort de Zaïd ou Ahmed par le quotidien La Vigie marocaine. La série a été intitulée : “Zaïd, roi des djicheurs”.
Six nouveaux coups de main des « hors-la-loi » du Todgha… qui malgré toutes les recherches restent insaisissables.
Les trois attaques à main armée auxquelles Zaïd Ou Ahmed et ses complices s’étaient livrés à environ un mois d’intervalle, avaient suscité une émotion assez vive dans la région de Todhra. Cependant, de tels faits n’étaient point très surprenants, car, en réalité, Tinerhir, qui est au centre de la vallée, n’était occupée que depuis le 18 février 1933 et nous n’assurions donc l’ordre que depuis un an dans ces parages difficiles, bordés au nord par les sommets très escarpés du Grand Atlas et au Sud par le relief chaotique du Djebel Sagho. Or, ces deux massifs offraient des ressources idéales pour les embuscades.
D’autre part, nos troupes avaient de multiples taches à assumer, car, tout en surveillant les ksour pour les protéger contre les actes de banditisme, elles n’en devaient pas moins assurer leur tâche de pacification dans les régions voisines. Ainsi, tandis que se déroulaient les événements relatés dans ces articles, les troupes de Tinerhir participaient à une actions destinée à couvrir le groupe mobile marchant sur l’oasis de Tazzarine, tout en luttant dans le haut Todgha contre un groupe de dissidents établis au col de Timezraï, au nord de Tinerhir. Par ailleurs, le gros de nos forces s’employait à réduire la dissidence du djebel Sagho dirigée par Hadj Hasso Ou Ba Sellam. Pour faire face à ces tâches multiples, nos forces devaient se livrer à de continuels déplacements impliquant de nombreuses difficultés de ravitaillement et comportant des dangers d’attaque de convois.
Une embuscade pour rien. Pourtant, il devenait nécessaire d’infliger une sévère punition à Zaïd et à ses complices et de mettre un terme à leurs exploits. A cet effet, un groupe de la fezza de Tinerhir leur tendit une embuscade nocturne à Talaïnt Moulay Ali. Ayant appris que les bandits se trouvaient dans les parages, on simula une corvée débonnaire qui était en réalité un groupe d’askris fortement armés. Comme on l’avait prévu, Zaïd et sa bande attaquèrent la corvée, mais ce fut le tir des askris qui leur répondit. Malheureusement, dans la nuit, le tir fut mal ajusté et les trois malandrins, poursuivis par les askris, parvinrent à s’enfuir à la faveur des ténèbres. Mais, ils durent avoir chaud, car, dans leur fuite précipitée, ils laissèrent tomber la montre-bracelet volée sur la dépouille mortelle du lieutenant Phellippon, tué à Assoul, le 26 juin 1934, et le bidon d’un des légionnaires tués le 11 juin dans l’attaque de l’araba sur la piste de N’Tisgui.
Un mois plus tard, nouvelle attaque sur le campement d’un détachement envoyé en reconnaissance dans le col du Timesraï, à 10 kilomètres au nord de Tinerhir, au delà des gorges. Comme dans la plupart des coups de main précédents, les bandits ont choisi la tombée de la nuit pour perpétrer leur coup. Et, à la faveur de l’obscurité, ils parviennent encore une fois à échapper à la poursuite, non sans avoir abattu l’un de nos partisans et blessé deux chevaux.
Dans les premiers jours de décembre 1934, dans les mêmes parages, des coups de feu sont tirés sur la garnison de la tour de garde d’Ouaoukouden, non loin d’une source située dans un ravin très escarpé. Cette fois, l’attaque a lieu en plein après-midi et on donna immédiatement l’alerte. Des patrouilles sont détachées vers le lieu où l’attaque s’est produite et elles trouvent un askri tué et deux de ses camarades blessés, baignant dans leur sang. L’emplacement d’où les bandits avaient tiré était si escarpé qu'ils eurent le temps de gagner leur repaire avant que les patrouilles aient escaladé les rochers.
Un groupe extrêmement mobile. Voici déjà sept mois que Zaïd et ses hommes tiennent la campagne, opérant parfois à deux, à trois ou à quatre personnages. Lesquels ne sont pas toujours les mêmes. Certains lui indiquent les coups à entreprendre, y participent avec lui, puis regagnent leurs ksar en attendant que l’effervescence s’apaise, tandis que Zaïd quitte l’endroit et va poursuivre ailleurs ses exploits, avec beaucoup d’autres complices. La crainte que les bandits inspiraient aux gens faisait taire les langues et leur grande mobilité rendait les mesures de défense inefficaces.
C’est ainsi que, le 27 janvier 1935, le sergent chef Cristanti qui, accompagné de deux hommes précédait le détachement qu’il commandait, avait à peine parcouru quelque centaines de mètres, lorsqu’à la sortie des gorges il fut foudroyé d’un coup de fusil. Le détachement, le premier moment de surprise passé, se lança à la poursuite des bandits, mais ceux-ci réussirent encore une fois à échapper en se dissimulant dans les rochers.
Quelques mois plus tard, le 17 août 1935, Zaïd et deux de ses hommes de main attaquèrent trois indigènes qui revenaient avec les bourricots de Timatriouine. L’attaque eut lieu en fin de journée, non loin de la tour de garde de l’Ourf entre Tinerhir et Foum el Kous sur la piste de Tinerhir à Boumalne. Sous la menace des fusils, les trois indigènes et leurs montures durent se rendre à l’écart de la piste et là, ils furent dépouillés de tout ce qu’ils possédaient, y compris leurs vêtements. Puis, quand la nuit fut venue, les bandits leur redirent la liberté.
Cinq jours plus tard, le cheik Embarek Ou Bouazza, des Aït Ouritane, à l’entrée des gorges Todgha, accompagné d’un de ses amis, parcourait le ravin de Dounab, lorsqu’ils tombèrent dans une embuscade qui leur fut tendue. Le cheik et son compagnon furent tués, dépouillés, et leurs armes et munitions leur furent enlevées.
Zaïd et ses complices, paraissent assurés de l’impunité la plus complète, puisque, cette fois encore, malgré toutes les recherches, on ne parvient pas à les arrêter.Mais, tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se casse…
Le bandit est enfin abattu dans son repaire. Mais pour venir à bout de Zaïd et de sa bande il fallut incendier le bordj où ils se terraient.
L’arrestation de Saïd ou Ahmed dit « Ou Tararout », à Assoul, fut le premier succès remporté par l’autorité contre la bande de Zaïd ou Ahmed, depuis près de vingt mois que les coupeurs de route mettaient en coupe réglée toute la région de Todgha. On ne tenait pas encore le principal coupable, mais un de ses principaux lieutenants et en procédant avec habilité, les autorités avaient la conviction qu’elles ne tarderaient pas à avoir le dernier mot dans cette sinistre affaire qui n’avait que trop duré.
C’est bien ainsi d’ailleurs que les choses se passèrent. Habilement cuisiné Saïd Ou Tararout désigna le ksar des Aït Chaïb comme étant celui où il avait séjourné en compagnie de Zaïd ou Ahmed. Il désigna ensuite un à un tous les complices du bandit répartis un peu partout dans les ksour de la région du Todhra et jusque dans le djebel Sagho. C’était là autant d’amis sûrs qui l’aidaient dans sa sinistre tâche et lui donnaient asile lorsqu’il était menacé par ses poursuivants. Enfin, ils étaient autant d’indicateurs pour le renseigner sur les coups de main à entreprendre.
Une indication précieuse : On apprit encore que Zaïd ou Ahmed et son principal lieutenant Moha Ou Hammou avaient l’intention de passer le prochain Aïd el Kébir chez un de leurs amis à Tadafalt. L’indication était précieuse, mais il était un peu délicat de mobiliser tous nos partisans un jour de fête comme l’Aïd el Kébir. Aussi fut-il décidé qu’on attendrait le lendemain pour tenter la prise des deux chenapans. Mais à la suite des interrogatoires que l’on a fit subir aux diverses personnes ayant approché le chef de la bande, on apprit que Zaïd devrait être ce jour là à Tadafalt N’Illelchan.
On mobilisa donc tous les supplétifs de Tinerhir et le 5 mars au petit jour, le ksar fut encerclé très étroitement car le bandit devait tomber coûte que coûte entre nos mains et, cette fois, il ne fallait pas le laisser échapper.
Le chef du ksar, qui était Hadj Hasso Ou Ba Sellam, le chef valeureux qui tint tête très héroïquement à nos troupes dans les derniers combats de la dissidence au Bou Gafer, dans le djebel Sagho, fut immédiatement convoqué. Il déclara qu’aucun homme correspondant au signalement du bandit ou de son complice principal n’habitait le ksar. Mais il indiqua qu’un personnage correspondant au signalement de l’intéressé habitait effectivement à Tadafalt. On pouvait avoir entière confiance dans les dires de Hadj Hasso Ou Ba Sellam qui, après avoir été notre adversaire le plus coriace, était aujourd’hui notre allié loyal.
Le dispositif d’attaque se déplaça donc immédiatement sur Tadafalt, situé à peu de distance de Taghia N’Illelchan dans le bas Todgha. Un peu avant 8h du matin, Tadafalt était encerclé et cette fois on était bien sur la bonne piste. Si l’on avait eu besoin d’une preuve, la vive fusillade qui éclate dès l’investissement du ksar l’aurait fournie… Les forces supplétives auxquelles s’étaient joints deux pelotons de la légion étrangère, ayant vu le bordj d’où partaient les coups de feu, se dirigèrent vers ce point et l’attaquèrent à la grenade. Mais, les bandits qui l’occupaient entendaient défendre chèrement leur peau et ils ne cessaient de tirailler contre tous ceux qu’ils apercevaient de leur position dominante.
A l’assaut du bordj. Trois mokhaznis avaient payé de leur vie leur courageuse attitude pour atteindre le bordj et il convenait de procéder de telle sorte que l’on ne paie pas d’un prix démesuré la capture des bandits. Aussi décide-t-on d’incendier le bordj. Quelques bidons d’essence furent réunis et l’on y mit le feu. De longues flammes léchèrent les murs et bientôt après, aucun coup de feu ne parvenait du repaire, on pénétra à l’intérieur. Là, Zaïd ou Ahmed, le roi des djicheurs, gisait abattu par une balle qu’il avait reçue en plein front. Un de ses complices, nommé Moha ou Ali, tomba de la tour du bordj et se tua. Un troisième gisait mort dans une pièce et enfin, le quatrième occupant, Ou Tana, fit une suprême tentative pour prendre la fuite, mais il fut abattu d’un coup de fusil. Il était midi trente et le nettoyage du bordj et de ses abords avait duré cinq heures.
Les forces de l’ordre avaient enfin réussi à capturer toute la bande dont les membres étaient morts ou vivants. De nombreuses arrestations de complices eurent lieu car dès la mort de Zaïd, les langues commencèrent à se délier et il fut possible de connaître le nom de tous ceux qui avaient participé à ses crimes ou qui s’étaient fait leurs complices. Enfin, de nombreuses armes furent récupérées au cours de ces opérations.
Depuis la fin de Zaïd ou Ahmed et de ses complices, le calme le plus absolu ne cesse de régner sur la vallée de Todgha, une des plus riantes régions de notre beau sud marocain. Les populations des palmeraies comme celles de la montagne travaillent paisiblement et connaissent enfin une sécurité totale. Elles ne craignent plus ni les razzia des nomades sahariens, ni les coups de main des bandits, ni les convoitises des populations voisines. L’insécurité dont la forme même des ksour prouve assez qu’elle était l’état endémique de cette région a pris fin et la paix française règne, que rien ne vient désormais troubler.
La fin d’une folle aventure : Ainsi se termine la folle aventure de Zaïd ou Ahmed dont la formule de banditisme se rapprochait de celle de la bande à Bonnot, qui mit en émoi toute la France en 1912. A ceci près que ceux que l’on nomme « les bandits en auto » étaient motorisés et opéraient dans les villes, tandis que Zaïd et les siens se déplaçaient à pied et opéraient dans les palmeraies ou en montagne. Les uns comme les autres étaient des « hors-la-loi» ayant déclaré une guerre sans merci à la société et à ses défenseurs pour vivre dans un individualisme exacerbé dont les caractéristiques étaient de vivre sur le dos d’autrui, sans travailler et avec un mépris absolu de la vie humaine. De telles révoltes contre la société sont vouées à l’échec rapide. Et la fin de la bande à Bonnot comme celle de Zaïd et de ses complices en furent l’éclatante démonstration.
Raymond Lauriac
Petite histoire de la fille d'un complice de Zaïd ou Ahmed
La justice passe – la confiance demeure
Extrait des souvenirs du général François de Furst, capitaine des A.I. à l'époque. Source : La Koumia
En 1935, le capitaine d'Arcimoles (futur général) était chef de bureau des A.I. d'Imilchil sur l'assif Melloul. Le nommé Zaïd ou Ahmed, après s'être querellé avec un chef de chantier, est parti en dissidence. Il a volé des armes et avec des complices, il a tué deux officiers et des légionnaires du 1er Régiment Etranger de cavalerie dans le poste de Tinerhir. C'est un mauvais exemple qui inquiète.
D'Arcimoles et Henry, chef d'un bureau voisin au Sud de l'assif, s'efforcent de le prendre. Il est un jour dénoncé par une vieille femme, assiégé dans une kasbah et tué. Entre autres, deux complices, un homme et une femme des Aït Haddidou sont morts au cours des opérations. Leur argent et leurs effets ont été ramassés et ramenés au bureau.
Ils avaient une fille, une jeune fille à marier de 12-13 ans. D'Arcimoles la fait venir et lui remet les biens de ses parents. « C'est toi le chrétien qui a fait mourir mon père et ma mère, dit-elle en tamazirth ? Je ne sais qui avait tort ou raison. Dieu jugera ». Et elle sort.
Aussitôt on frappe à la porte et la petite entre à nouveau :
« Sid el Captan (Monsieur le capitaine), je voudrai que tu me gardes tout ça (ce qui lui as été remis précédemment).
- Mais, dit d'Arcimoles, tu viens de me dire que nous étions responsable de la mort de tes parents. Maintenant tu veux me confier ton bien ?
- Ce n'est pas la même chose ! Pour la mort de mes parents, j'ai dit que Dieu jugerait entre toi et eux. Mais cet argent, ces bijoux, si je les emporte, il est sûr que mes oncles me les prendront, tandis que, si tu veux bien me les garder, je suis sûre de les retrouver quand j'en aurai besoin... »
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